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  • admin9596 8:29 pm le April 29, 2016 Permaliens  

    Karen Nettleton, une grand-mère australienne seule contre l’EI 

    Face au refus des autorités de son pays de l’aider, cette Australienne a tenté d’aller chercher ses cinq petits-enfants en Syrie. Sans succès.

    L’Australienne Karen Nettleton raconte dans un reportage diffusé en juin 2015 sur ABC (Australian Broadcasting Corporation) son combat désespéré pour retrouver ses petits-enfants abandonnés en Syrie.

    « Je reviendrai, je ne les laisserai pas là…Il faudra peut-être trois, quatre, cinq tentatives. Mais ne sous-estimez pas la détermination de la mamie que je suis. » Les Australiens commencent à bien la connaître, cette grand-mère, Karen Nettleton, qui refuse de se résigner. Ses cinq petits-enfants ainsi que le nourrisson de sa petite-fille de 14 ans se trouvent en Syrie depuis 2014, probablement à Rakka, la capitale de l’organisation Etat islamique (EI) dans le pays. Il y a quelques semaines, elle s’est rendue en Turquie afin d’aller elle-même les chercher, mais l’opération a échoué et elle a dû rentrer seule à Sydney début avril.

    A 8 ans, on lui fait brandir une tête tranchée

    De cette famille, les Australiens ne connaissent pas seulement la grand-mère. Son gendre, Khaled Sharrouf, est devenu, en août 2014, le plus célèbre des combattants australiens de l’EI. Ses photos diffusées sur Twitter ont horrifié le pays, notamment celle de son enfant de 8 ans brandissant la tête tranchée d’un officiel syrien. « Ça, c’est mon fils ! », écrivait-il fièrement en légende. « C’est la pire chose que j’ai vue dans ma vie », réagissait, en larmes, Karen Nettleton, sur la chaîne de télévision ABC (Australian Broadcasting Corporation). « Cet enfant est tellement adorable. Oui, adorable », priait-elle de croire les téléspectateurs. Mais Khaled Sharrouf a continué de faireposer ses fils, y compris le plus jeune, 3 ans à ce moment-là, en tenue de combattant, une arme à la main.

    Australien d’origine libanaise, l’homme a épousé au début des années 2000 la fille unique de Karen Nettleton, Tara, qui était alors âgée de 15 ans et qui s’est convertie à l’islam. En 2013, grâce au passeport de son frère, Sharrouf quitte le pays pour aller combattre en Syrie, réussissant ainsi à déjouer les services de renseignement qui le surveillaient. Un an après, Tara et leurs cinq enfants s’envolent à leur tour, là encore sans être inquiétés. Voici la famille réunie en Syrie, au service de l’EI. A 13 ans, la fille aînée, Zaynab, épouse un combattant : il s’agirait d’un ami de son père, l’Australien Mohamed Elomar. Peu après, elle tombe enceinte.

    Cinq enfants orphelins et un bébé

    Depuis, son mari aurait été tué dans des frappes aériennes, tout comme son père. Mais le décès de Khaled Sharrouf, annoncé par de nombreux médias, n’a jamais été confirmé par les autorités australiennes. Il y a en revanche peu de doute sur la mort de Tara Nettleton : elle aurait péri en septembre 2015, à l’âge de 31 ans, suite à des complications après une opération de l’appendicite. Zaynab, 14 ans, Hoda, 13 ans, Abdullah, 11 ans, Zarqawi, 10 ans et Humzeh, 5 ans, les petits-enfants de Karen Nettleton, seraient donc livrés à eux-mêmes, sans parents, dans cette Syrie contrôlée par l’EI. Sans oublier le bébé de Zaynab, né il y a quatre mois.

    « Il faudrait voir à quoi ces enfants ont été exposés et estimer s’ils représenteront une menace, tôt ou tard », Peter Dutton, ministre australien de l’immigration

    Karen Nettleton a d’abord appelé le gouvernement australien à sauver ces enfants. En vain. Selon Canberra, une centaine d’Australiens ont rejoint l’EI ou d’autres groupes terroristes en Syrie et en Irak. La ministre des affaires étrangères, Julie Bishop, a décrit les enfants Sharrouf comme « des victimes de l’idéologie extrémiste de leurs parents », qui se trouvent « dans une zone de guerre malgré eux ». Mais, a ajouté la ministre, « en raison de la situation extrêmement dangereuse sur place », l’Australie« n’a pas la capacité de leur apporter une aide consulaire ». Pour son collègue chargé de l’immigration, Peter Dutton, s’ils devaient revenir dans le pays, « il faudrait voir à quoi ces enfants ont été exposés et estimer s’ils représenteront une menace, tôt ou tard ».

    Face au refus du gouvernement, Karen Nettleton a décidé d’aller elle-même chercher ses petits-enfants. Avec son avocat, elle a pris l’avion mi-mars 2016 pour la Turquie. De là, elle devait se rendre en Syrie, mais elle a fini par renoncer. Son avocat a reproché au gouvernement de n’avoir été « d’aucune aide ».

    Lire aussi : L’Australie souhaite déchoir ses « terroristes identifiés » de leur nationalité

    Mme Nettleton a également accusé les médias. Un journal a en effet consacré sa « une » à son plan pour aller chercher ses petits-enfants et d’autres médias ont suivi. Cette couverture médiatique aurait fait peur à des personnes qui devaient aider Karen Nettleton et il lui a été conseillé de quitter la Turquie pour sa sécurité. « C’est horrible, a-t-elle déclaré à la chaîne ABC alors qu’elle s’apprêtait à quitter Ankara. J’imaginais les enfants occuper toute une rangée dans l’avion, Hamze arpenter le couloir, le bébé pleurer. Et maintenant, il n’y a que moi. » A son arrivée à Sydney, elle a été arrêtée par l’unité antiterroriste, qui l’a relâchée au bout d’une heure. Karen Nettleton assure qu’elle n’a pas dit son dernier mot.

    Lire aussi : L’exil à Paris d’une Syrienne qui osa défier l’Etat islamique

     
  • admin9596 6:53 pm le April 26, 2016 Permaliens  

    Frédéric Lordon, les mots de Nuit debout 

    Celui qui refuse d’être l’incarnation du mouvement citoyen est devenu une figure incontournable de la mobilisation contre le projet de loi El Khomri.

    La place de la République n’a pas encore été évacuée ce samedi 9 avril.Sous une pluie intermittente se tient, comme tous les jours depuis le 31 mars, l’assemblée générale de Nuit debout. Une AG précédée d’un meeting. A la tribune se succèdent un syndicaliste de La Poste, des cheminots en colère, des opposants à la « loi travail », ou les sociologues Monique et Michel Pinçon-Charlot.

    Puis vient le tour de Frédéric Lordon. « On ne tient pas éternellement une société avec BFM, de la flicaille et du Lexomil ! », lance l’économiste. Un discours applaudi par une foule nombreuse, où se mêlent étudiants, militants, mais aussi curieux. Car l’économiste est devenu une figure incontournable de la contestation sociale née autour de la mobilisation contre le projet de loi El Khomri.

    Frédéric Lordon, le 9 avril, place de la République, à Paris.

    Le 30 mars, c’est dans l’amphithéâtre occupé de Tolbiac que le comité de mobilisation de Paris-I l’avait invité à intervenir. Au milieu des étudiants, de l’avocat des employés de Goodyear et des cheminots en grève, Frédéric Lordon se déclarait heureux d’assister à ce « petit quelque chose » qui pourrait, selon lui, « faireprécipiter tout ce qui est en l’air depuis longtemps ». Et remerciait la ministre du travail, et la loi à son nom, qui ont le « merveilleux pouvoir » de réunir« les jeunes avec les classes ouvrières ». C’est le début de son idylle avec les étudiants et de ce mouvement protéiforme qui a notamment donné naissance à Nuit debout.

    « Il fait un travail remarquable d’élucidation. » Thomas Coutrot, économiste

    A 54 ans, Frédéric Lordon est un homme en colère. Directeur de recherche au CNRS, passé par les Ponts et chaussées puis par l’Institut supérieur des affaires (devenu aujourd’hui MBA HEC), il fait ses classes avec Robert Boyer, qui dirige sa thèse d’économie à l’EHESS. Membre des Economistes atterrés, un mouvement créé en 2011 alors que de fortes mesures d’austérité viennent d’être prises au Portugal, en Espagne et en Grèce, il défend l’idée selon laquelle les citoyens doivent revenir dans le débat des politiques économiques et fustige l’emprise des marchés financiers sur les Etats. « On fait partie de ces chercheurs qui considèrent que l’économie est une science sociale et politique », souligne Thomas Coutrot, un autre de ces Economistes atterrés, qui s’est également rendu place de la République dès les premières Nuit debout.

    Paris, 9 avril 2016, place de la République, dixième Nuit Debout consécutive.

    A la fois économiste, sociologue et philosophe, Frédéric Lordon, lui, prône plus radicalement une sortie de la zone euro et du capitalisme. « Le salariat est un rapport social de chantage », explique-t-il dans un entretien mis en ligne le 7 avril sur La Pompe à phynance. Hébergé par le site du Monde diplomatique, son blog est sa seule contribution régulière aux médias, qu’il fustige. Mais, s’il refuse de parler à la presse (il n’a pas souhaité répondre à nos questions), on l’a vu quelquefois sur les plateaux de télévision, notamment en avril 2015 dans l’émission de Frédéric Taddeï, « Ce soir (ou jamais !)». Face à Thomas Piketty, il s’opposait vivement à la thèse développée par l’auteur du Capital au XXIe siècle.

    Le 9 avril, au milieu de cette foule hétéroclite qui rêve de révolution, Frédéric Lordon apparaissait comme celui « qui met des mots sur ce que les gens ressentent, constate Thomas Coutrot. Il fait un travail remarquable d’élucidation ». « C’est important qu’il y ait des intellectuels qui nous rejoignent, insiste Aline Pailler, ancienne eurodéputée, animatrice sur FranceCulture, très investie dans Nuit debout. La pensée est ce qui est efficace. »

    Pour autant, Frédéric Lordon refuse d’être l’incarnation de ce mouvement. Alors, leader malgré lui ? L’homme est surtout au cœur d’un mouvement qui ne veut pas de figure dominante, mais qui accueille volontiers les penseurs. A l’image de « l’horizontalité » de l’organisation que visent les manifestants.

    Lire aussi : Où va la Nuit debout ?

    Valentin Ehkirch

     
  • admin9596 3:55 am le April 25, 2016 Permaliens  

    La résurrection des reliques 

    Disciples, admirateurs ou simples collectionneurs, ils ont subtilisé un doigt, un crâne, un os sur la dépouille de leur idole.


    1954 : le crâne de Joseph Haydn

    Le crâne de Joseph Haydn.

    C’est au moment du transfert de la dépouille du compositeur autrichien (mort en 1809 et d’abord inhumé à Vienne) à Eisenstadt, en 1820, dans l’église du Calvaire, que l’on s’était aperçu que sa tête avait disparu, dérobée par deux étudiants qui ont réussi à la conserver jusqu’à leur mort. Ce crâne sera exposé au musée avant de retrouver sa place en 1954.


    2007 : le cerveau d’Einstein

    Thomas Harvey (1912-2007) avec le cerveau d'Albert Einstein.

    Le physicien, mort en 1955 à Princeton, aux Etats-Unis, avait ordonné que son corps soit incinéré et que ses cendres soient dispersées dans un lieu secret. Mais le médecin chargé de l’autopsie, Thomas Harvey, a ôté en douce le cerveau du théoricien de la relativité et l’a conservé jusqu’à son décès en 2007, date à laquelle il fut acquis par le National Museum of Health and Medicine de Chicago.


    2009 : les doigts de Galilée

    Le majeur de la main droite de Galilée.

    Lors d’une vente, un collectionneur italien achète une dent, un pouce et un doigt qui seront par la suite authentifiés comme étant ceux de Galilée, le célèbre physicien et astronome italien mort en 1642. Les restes trouvés, de même qu’un autre doigt et une côte, avaient été subtilisés par l’un des disciples de Galilée lors du transfert de sa dépouille dans la basilique Santa Croce, à Florence, en 1737.


    2010 : les os de saint Nicolas

    Le buste reliquaire de saint Nicolas.

    La Turquie réclame à l’Italie la restitution des restes du saint, considéré comme l’ancêtre chrétien du Père Noël. Volés à Myre (l’actuelle Demre, en Turquie) au XIe siècle par des marins italiens, ils ont été transférés dans la basilique de Bari, en Italie. Une phalange et quelques morceaux d’os sont également conservés dans la basilique de Saint-Nicolas-de-Port (Meurthe-et-Moselle) et d’autres à Fribourg, en Suisse.


    2016 : la tête de Shakespeare

    La tombe de William Shakespeare à l'église la Sainte-Trinité à Stratfordupon-Avon (Angleterre).

    Dans le cadre d’un documentaire diffusé par la chaîne britannique Channel 4, des archéologues ont effectué une radiographie de la tombe du grand dramaturge qui repose dans l’église la SainteTrinité à Stratfordupon-Avon. Les résultats accréditent la thèse selon laquelle « à un moment de l’histoire, quelqu’un est venu s’emparer de son crâne ». Une chose est sûre, il n’est plus là.

     
  • admin9596 10:49 am le April 24, 2016 Permaliens  

    Indépendance de Hongkong : après les « parapluies », les partis 

    Le Hong Kong National Party, qui plaide pour la création d’une « République libre de Hongkong », est le dernier-né des partis issus de la « révolution des parapluies ».

    Visage poupon, frange sur le front et lunettes rectangulaires, Chan Ho-Tin, 25 ans, tout juste diplômé de l’Université polytechnique de Hongkong, prend place, ce 27 mars, devant un pupitre rudimentaire chargé de micros. Un instant impressionné par les reporters en face de lui, le jeune militant annonce solennellement, en cantonais, la création du Hong Kong National Party (HKNP). Sa particularité : réclamer ouvertement l’indépendance de Hongkong, actuellement région administrative spéciale (RAS) de la République populaire de Chine. Une première pour une organisation politique.

    Le jeune militant Chan Ho-Tin vient de créer Hong Kong National Party appelant de ses voeux une "République libre de Hongkong".

    Chan Ho-Tin envisage la création d’une « République libre de Hongkong ». Rien de moins. Pour l’heure, les troupes de ce nouveau « parti » sont modestes. Son fondateur revendique de trente à cinquante membres, dont la moitié est constituée d’étudiants. Le manifeste du HKNP, publié sur Facebook, dénonce la « colonisation de Hongkong par la Chine » depuis 1997, date de la prise de contrôle par Pékin de l’ancienne colonie britannique. « La Chine envoie chaque jour environ 150 personnes s’installer à Hongkong. Ils essaient de nous forcer à parler la même langue qu’eux [le mandarin], de nous laver le cerveau avec leurs idéaux patriotiques dans nos écoles, et de submerger Hongkong d’investissements rouges », peut-on lire.

    Un miniséisme politique

    Ce miniséisme politique s’est fait sentir jusqu’à Pékin, où le quotidien Global Times, porte-parole belliciste du Parti communiste, a condamné les « idées extrêmes » de ces « séparatistes à la petite semaine », dont « l’initiative ressemble à un gag ». A Hongkong, un porte-parole du gouvernement local a rappelé que « toute suggestion de l’indépendance », ou tout mouvement qui la promeut, va « à l’encontre de la Basic Law ». Cette mini-Constitution, qui gouverne la RAS, dispose que « Hongkong forme une partie inaliénable de la Chine ». Dans l’opposition, plusieurs voix ont fait valoir que réclamer l’indépendance, sans agir de manière violente pour l’obtenir, relève du droit d’expression.

    Une manifestation à l'occasion du premier anniversaire de la "révolution des parapluies", à Hongkong, le 28 septembre 2015.

    Si la viabilité du HKNP en tant que parti est loin d’être acquise, sa création teste, comme aucune entité ne l’avait fait jusqu’alors, les limites du principe « Un pays, deux systèmes ». Hongkong dispose d’un haut degré d’autonomie, de sa propre justice et du multipartisme malgré un système électoral encore structurellement biaisé en faveur de Pékin. A un an du 20anniversaire de la rétrocession de Hongkong à la Chine, le 1er juillet 2017, les tensions sont vives entre les habitants et Pékin.

    Des partis issus de la « révolution des parapluies »

    En 2014, les conditions imposées par les autorités dans la mise en œuvre d’un suffrage universel à Hongkong avaient jeté la jeunesse dans la rue lors de la « révolution des parapluies ». Pékin voulait décider du choix des candidats au poste de chef de l’exécutif. Malgré la mobilisation, non seulement le pouvoir chinois n’a cédé sur rien, mais il a même accru ce que beaucoup à Hongkong perçoivent comme son emprise souterraine sur le territoire – notamment en s’attaquant à des éditeurs indépendants de livres critiquant le régime communiste.

    HKNP est un des partis issus de la « révolution des parapluies » : s’est également créée la formation « localiste » Hong Kong Indigenous, dont le chef de file, Edward Leung, 24 ans, a créé la surprise en remportant récemment 15 % des votes lors d’une élection partielle locale. Quant à Joshua Wong, 19 ans, figure de proue des « parapluies », il vient de lancer son propre parti, Demosisto, le 10 avril.

    Le leader étudiant Joshua Wong (à droite) et Nathan Law lors de l'annonce de la création de leur nouveau parti "Demosisto", à Hong Kong, le 10 avril 2016.

    Son projet ? Proposer par référendum l’autodétermination aux Hongkongais en 2047 – date prévue de péremption de la formule « Un pays, deux systèmes ». En lice pour les élections de septembre, qui renouvelleront le Conseil législatif de Hongkong, cette nouvelle génération de politiciens hongkongais n’a qu’une idée en tête : résister au géant chinois.

    Lire aussi : A Hongkong, un leader du mouvement prodémocratie accuse la banque HSBC de censure

     
  • admin9596 7:21 pm le April 21, 2016 Permaliens  

    Donald Trump et Corey Lewandowski unis pour le meilleur et pour le pire 

    Le directeur de campagne du magnat de l’immobilier avait violemment agrippé une journaliste qui souhaitait poser une question au candidat à la présidentielle américaine.

    Donald Trump avec (à sa droite) son directeur de campagne Corey Lewandowski lors d'un meeting, à Palm Beach (Floride), le 15 mars.

    C’est l’alliance entre le torrent verbal et le silence, entre le cheveu travaillé et le poil ras, entre l’aisance et le laborieux. L’embauche par Donald Trump de Corey Lewandowski, six mois avant sa déclaration de candidature, a été le premier jalon de l’aventure électorale du magnat de l’immobilier. Pour le meilleur, puisque le milliardaire caracole en tête des primaires républicaines en vue de l’élection présidentielle américaine. Mais aussi, désormais, pour le pire, car le zélé Lewandowski doit affronter une embarrassante inculpation pour voie de fait après avoir agrippé trop vigoureusement, le 8 mars, une journaliste qui tentait de poser une question à son patron.

    Lire aussi : Le bras droit de Donald Trump accusé de voies de fait

    Au départ, l’arrivée du futur directeur de campagne dans l’entourage de Trump n’a surpris personne. Et pour cause. Corey Lewandowski, 42 ans, est un praticien de la politique comme il en existe sans doute des centaines aux Etats-Unis. Et il était plutôt, jusqu’alors, un spécialiste des causes désespérées.

    Un parcours éclectique

    Son CV, avant de se mettre au service du milliardaire, était banal. Après avoir perdu, en 1994, une campagne pour un siège de représentant à la Chambre du Massachusetts, Corey Lewandowski participe quatre ans plus tard à la réélection d’un membre du Congrès des Etats-Unis, Bob Ney, dont il devient brièvement le chef de cabinet. Mais ce dernier tombe quelques mois plus tard dans le cadre d’une vaste affaire de corruption et de fraude fiscale, le scandale Jack Abramoff.

    En 2002, le jeune homme reprend du service pour la campagne d’un ancien républicain passé par la case indépendant, Bob Smith, qui ambitionne de se faireélire au Sénat des Etats-Unis. Ce dernier l’accueille, selon ses souvenirs confiés au Washington Post, par une formule assez peu encourageante : « Si vous cherchez à faire carrière au Parti républicain, vous n’êtes sans doute pas au bon endroit. » Bob Smith se montre perspicace puisque sa défaite lors des primaires républicaines éloigne le jeune ambitieux de la politique active.

    Lewandowski s’oriente ensuite vers la défense du secteur de la pêche en Nouvelle-Angleterre, puis vers un cabinet de lobbying. Une formation au sein de la police d’Etat du Massachusetts, en 2006, ajoute une note d’éclectisme à un parcours placé sous le signe de la nécessité. En 2008, il prend encore une autre direction, au sein de l’organisation Americans for Prosperity, un groupe d’intérêts lié aux milliardaires conservateurs Charles et David Koch. Le caractère abrasif de Lewandowski, directeur de l’antenne du New Hampshire, y laisse des traces.

    Un sentiment d’impunité

    Autant dire que la rencontre avec Donald Trump, en avril 2014, relève pour lui de l’aubaine. D’autant que le milliardaire lui laisse rapidement les coudées franches, s’affranchissant très vite de son ancien conseiller politique, Roger Stone. A l’inverse de ce dernier, qui voulait faire évoluer son image, Corey Lewandowski a toujours plaidé pour que « Trump [soit] Trump », selon le mot d’ordre lancé le jour de la déclaration de candidature, le 16 juin.

    Cette attitude respectueuse a assurément garanti la solidité de l’attelage pendant les mois du succès, lorsque le milliardaire convertissait les intentions de vote des sondages en véritables bulletins pour les primaires. Elle a, en revanche, privé Donald Trump d’un garde-fou au moment des épreuves. Le sentiment d’impunité entretenu par les victoires à répétition a-t-il poussé Lewandowski à la faute ? La justice se prononcera le 5 mai sur l’affaire de l’agression présumée de la journaliste Michelle Fields.

    En attendant, le magnat de l’immobilier a déjà élargi son cercle. Il bénéficie depuis peu des conseils d’un vétéran de l’industrie politique, Paul Manafort. Exposé à la lumière par la réussite spectaculaire de son modèle, Corey Lewandowski pourrait bien retourner à une ombre beaucoup plus familière.

    Vidéo de l’agression de Michelle Fields

     
  • admin9596 1:49 pm le April 20, 2016 Permaliens  

    Shabbat à deux vitesses à Jérusalem 

    Les ultraorthodoxes ont obtenu du maire la fermeture des commerces juifs situés près de la vieille ville, le samedi. Les contrevenants s’exposent à de fortes amendes.

    L’histoire débute à l’été 2015, avec l’ouverture d’un complexe cinématographique dans la ville trois fois sainte. Avec ses seize salles, le Yes Planet, installé dans le sud de Jérusalem, est ouvert sept jours sur sept. Y compris, donc, pendant shabbat, du vendredi au coucher du soleil au samedi soir, lorsque les juifs religieux sont tenus de limiter leur interaction avec le monde moderne. Des manifestations sont rapidement organisées par des riverains craignant des nuisances sonores mais surtout par des ultraorthodoxes qui veulent étendre l’interdiction religieuse partout dans la ville.

    Sous la pression des ultraorthodoxes, le maire de Jérusalem a décidé début janvier de faire appliquer une loi de 1955 qui prévoit la fermeture des commerces juifs pendant shabbat.

    Entre alors en jeu Nir Barkat, maire de Jérusalem « réunifiée », dénomination qui englobe la partie ouest et la partie est de la ville, annexée par Israël en 1967, où vivent 200 000 Palestiniens. Pour éteindre la grogne des hommes en noir, le premier magistrat décide début janvier de faireappliquer une loi de 1955 qui prévoit la fermeture des commerces juifs pendant shabbat. Mais son injonction se limite à sept épiceries de Jérusalem-Ouest au motif qu’elles sont situées non loin de la vieille ville. Depuis le 1er avril, leurs rideaux sont censés rester baissés à partir du vendredi soir.

    Perte de 20 % du chiffre d’affaires

    Derrière sa caisse, Gidon Siboni ne décolère pas. Propriétaire d’un petit supermarché sur l’une des artères très fréquentées de Jérusalem-Ouest, ce Hiérosolymitain grisonnant salue toutes les deux minutes un ami ou une connaissance de l’autre côté de la rue. Son épicerie est ouverte tous les jours « et elle le restera », affirme haut et fort le commerçant, qui se dit prêt à se battre contre cette décision. Cette mesure, si elle était appliquée, lui ferait perdre, selon ses calculs, près de 20 % de son chiffre d’affaires.

    En activité depuis vingt-cinq ans, Gidon Siboni n’a pas de mots assez durs pour qualifier son premier édile. « Peu importent les conséquences, nous irons jusqu’au bout », assure-t-il avec un aplomb étonnant quand on sait que les amendes prévues s’élèvent à plus de 200 euros par shabbat et une possible perte de la licence d’exploitation. Avec quatre compagnons d’infortune, Gidon Siboni a embauché Yossi Havilio, un avocat qui connaît par cœur les rouages de la municipalité, dont il était le conseiller juridique jusqu’à il y a peu dans d’autres affaires. Sa mission : contester les amendes qui seront dressées contre les réfractaires. Les deux autres propriétaires concernés, moins téméraires, ont annoncé qu’ils seraient désormais fermés ce jour-là.

    « Dans cette affaire, nous sommes les boucs émissaires », lâche le commerçant. Et de regretter le laxisme de la mairie envers le cinéma : « Le maire préfère s’attaquer au petit commerce et se ranger du côté des ultraorthodoxes. » La municipalité, pour sa part, assume la fin de cette tolérance, tout en assurant que cette mesure n’est ni punitive ni discriminatoire. La preuve ? L’épicerie chrétienne pourra, elle, être ouverte le samedi mais devra être fermée le dimanche.

    « Les revendications des religieux sont de plus en plus entendues car leur poids électoral croît. » Denis Charbit, sociologue

    Directeur du journal juif orthodoxe Kountrass, le rabbin Henri Kahn se réjouit de cette semi-victoire : « C’est vrai que les choses sont en train de bouger et nous n’allons pas nous en plaindre. » Il se félicite que sa communauté puisse désormais influer sur les débats internes dans le pays.

    Le sociologue Denis Charbit, auteur d’Israël et ses paradoxes (Le Cavalier bleu, 2015), n’est pas surpris par ces polémiques. Le pourcentage de religieux à Jérusalem ne cesse d’augmenter. Il atteint aujourd’hui 40 % de la population juive de la ville. « Leurs revendications sont de plus en plus entendues car leur poids électoral croît. Mais Nir Barkat, le maire de Jérusalem, doit jongler avec les communautés très différentes qui composent sa ville », analyse le chercheur à l’université ouverte d’Israël. Un jeu très subtil pour un élu conforté à son poste, en 2013, par une coalition hétérogène d’électeurs de gauche, centristes et orthodoxes.

    Les laïcs ont-ils définitivement perdu Jérusalem ? La question a le mérite d’être posée quand on sait que le solde migratoire dans la Ville sainte est négatif et que « ceux qui partent sont essentiellement de jeunes Israéliens assez éloignés de la religion », souligne Denis Charbit dans ses recherches. Ceux qui restent et qui oublieraient de faire leurs courses pendant la semaine pourront toujours allermanger du pop-corn au cinéma le vendredi soir ou le samedi.

    Lire aussi En Israël, shabbat ou Shabus ?

     
  • admin9596 5:15 pm le April 19, 2016 Permaliens  

    Yvan Mayeur, le batailleur bourgmestre de Bruxelles 

    Le Monde | 06.04.2016 à 09h19 • Mis à jour le06.04.2016 à 09h21 |Par Laurent Telo

    Le bouillant édile socialiste n’a pas ménagé Jan Jambon, ministre de l’intérieur, qu’il le juge responsable des perturbations de hooligans lors des hommages aux victimes des attentats du 22 mars.

    Yvan Mayeur lors d'une conférence de presse après les attentats de Bruxelles, le 22 mars 2016.

    Réformateur

    Yvan Mayeur, membre du Parti socialiste francophone, surnommé « Armani » pour son look apprêté, est devenu bourgmestre de Bruxelles le 13 décembre 2013, à 53 ans. A peine élu,il réforme à tour de bras. Il bouleverse notamment les habitudes de la police bruxelloise, qu’il veut moins répressive, et bannit la voiture des grands boulevards du centre-ville.

    Tacticien

    Son prédécesseur, Freddy Thielemans, tout en gouaille et en rondeur, aurait préféré qu’un autre socialiste que Mayeur lui succède. Même l’appareil national du parti, emmené par

    Elio Di Rupo, avait misé sur Philippe Close… qui n’a jamais osé se présenter. Yvan Mayeur, habile tacticien politique, avait réussi à rallier à sa cause les cadres intermédiaires du parti.

    Intransigeant

    Ancien militant de SOS racisme, Mayeur est un opposant médiatique du pouvoir fédéral incarné par une coalition de libéraux et de démocrates-chrétiens flamands. Un gouvernement bancal pas vraiment au goût du bourgmestre, qui ne se gêne pas pour l’interpeller sur Twitter : « Il n’y a plus d’Etat belge », clame-t-il lorsque le pouvoir tergiverse sur l’accueil des migrants.

    Le ministre belge de l'intérieur Jan Jambon (à g.) et le maire de Bruxelles Yvan Mayeur, le 26 mars 2016, lors d'une conférence de presse à la suite du double attentat qui a fait 32 morts et 340 blessés dans la capitale belge.

    Fort en gueule

    La cible favorite de Mayeur : les nationalistes flamands qu’il faudrait, dit-il, « mettre hors d’état de nuire ». Le 27 mars, l’hommage aux victimes de Bruxelles a été perturbé par 400 hooligans. Mayeur a accusé le ministre de l’intérieur, Jan Jambon, un nationaliste flamand ultra, d’avoir délibérément laissé débarquer ces « fascistes » en plein Bruxelles.

    Lire aussi Attentats de Bruxelles : Anne Hidalgo main dans la main avec le bourgmestre, Yvan Mayeur

    • Laurent Telo

      Journaliste au Monde
     
  • admin9596 7:02 am le April 18, 2016 Permaliens  

    Matchs truqués, dopage… Le monde du tennis pris dans le filet 

    Entre triche, sexisme et soupçon de meurtre, 2016 est déjà une année noire pour le tennis. De plus en plus éloigné de son image de sport bien élevé.

    17 janvier : paris truqués

    L'Open d'Australie, à Melbourne.

    Au moment de l’Open d’Australie, la publication d’une enquête de Buzzfeed et de la BBC a fait l’effet d’une bombe : de nombreux matchs seraient achetés au profit de parieurs. Sur 100 événements sportifs soupçonnés d’avoir été truqués en 2015, 73 seraient des matchs de tennis, selon l’Association européenne pour la sécurité et l’intégrité dans le sport.

    Janvier et février : rififi à la FFT

    Gilbert Ysern, ex-directeur général de la Fédération française de tennis.

    Le directeur général de la Fédération française de tennis (FFT), Gilbert Ysern, renvoyé mi-janvier, a dénoncé une éviction « violente et brutale ». Quelques jours plus tard, Le Canard enchaîné se fait l’écho d’écarts de conduite reprochés en interne à Jean Gachassin, le président : des frais de bouche excessifs, des passe-droits pour ses amis, une consommation exagérée d’alcool…

    7 Mars : Sharapova dopée

    Maria Sharapova à l'Open d'Australie.

    Lorsque Maria Sharapova, la star russe du tennis, a convoqué la presse le 7 mars, beaucoup pensait qu’elle annoncerait, à 28 ans, sa retraite sportive. Elle a en fait révélé son contrôle positif au meldonium, un médicament classé parmi les hormones et modulateurs métaboliques. Nombre d’observateurs considèrent que le tennis ne fait pas le ménage comme il le devrait.

    20 mars : guerre des sexes

    Raymond Moore, l'ex-directeur du tournoi Indian Wells, aux Etats-Unis, le 20 mars 2016.

    Raymond Moore, le directeur du tournoi d’Indian Wells, aux Etats-Unis, a cru bon de dénoncer la parité des gains entre hommes et femmes dans le tennis. Selon lui, les joueuses « devraient se mettre à genoux pour remercier Dieu » que Roger Federer et Rafael Nadal aient porté leur sport aussi haut. Il a démissionné le 21 mars, à la suite du tollé déclenché par ses propos. Sans fairecesser la polémique.

    24 mars : fait divers

    Mark De Jong (à droite) est le coach de Robin Haase. Ici à Wimbledon en 29 juin 2015.

    Mark De Jong (à droite), coach de Robin Haase (à gauche), le meilleur joueur néerlandais

    est arrêté à Amsterdam. Il est soupçonné du meurtre de Koen Everink, un homme d’affaires actif dans le milieu du tennis. Mark De Jong, 29 ans, lui-même ancien joueur professionnel, est retraité des courts depuis 2013.

     
  • admin9596 1:07 pm le April 15, 2016 Permaliens  

    En Inde, on ne rigole pas avec les Sikhs 

    Le Monde | 04.04.2016 à 14h43 • Mis à jour le08.04.2016 à 14h37 |Par Julien Bouissou (New Delhi, correspondance)

    Véritable passion nationale, les histoires drôles sur les Sikhs ne font pas rire tout le monde. En particulier les membres de la communauté, qui ont saisi la Cour suprême pour les faire interdire.

    Lors d'une célébration sikhe, à Nihang, dans le nord de l'Inde, un homme porte un turban de 650 m de long.

    La très prestigieuse Cour suprême indienne va-t-elle interdire les histoires drôles ? L’avocate Harvinder Chowdhury a saisi l’auguste institution pour réclamer l’interdiction des plaisanteries tournant en dérision les Sikhs. Selon elle, ces blagues heurtent les sentiments de la communauté, et ridiculisent les « Sardars », ceux qui portent le turban, en les faisant passer pour des « personnes idiotes et ridicules ». « Cela équivaut à une violation du droit fondamental à la dignité humaine garanti par la Constitution », a plaidé l’avocate, en octobre 2015, pour convaincre les juges de se saisir de cette plainte.

    Ces histoires drôles sont sans doute, après le cricket, la deuxième passion du pays. Pas un Indien qui ne veuille impressionner son interlocuteur en lui livrant la dernière blague sikhe. En voici un modeste florilège : « Tiens, un oiseau mort, observe un passant. – Où est-il ? », demande le Sardar en levant les yeux vers le ciel. Ou encore : « Pourquoi un Sardar n’a-t-il jamais de glaçons chez lui ? Parce qu’il ne connaît pas la recette. »

    5 000 sites Internets spécialisés

    Les blagues sikhes sont au reste des Indiens ce que les blagues belges sont aux Français. Plusieurs humoristes indiens ont été arrêtés par la police pour avoir porté atteinte au sentiment et au respect d’autrui, qui limite la liberté d’expression dans le pays. Il suffit qu’un individu soit offusqué pour pouvoir réclamer la censure au nom de toute sa communauté. Mais « comment, concrètement, interdire ces histoires drôles ? », a demandé l’un des juges de la Cour suprême en octobre 2015. Il est en effet difficile d’identifier leurs auteurs ou d’obtenir la preuve que quelqu’un a ri en écoutant une blague interdite.

    Les plaignants ont fourni une liste de 5 000 sites Internet spécialisés dans les blagues sikhes dans l’espoir que le ministère indien des nouvelles technologies en bloque l’accès. L’un des juges a observé que ces histoires sont si populaires parmi les Sikhs que ces derniers seront sans doute les premiers à se plaindre de leur interdiction. L’audience, prévue le 5 avril, a été reportée en juillet.

    Lire aussi : En Inde, la caricature des divinités hindoues n’est plus en odeur de sainteté

    • Julien Bouissou (New Delhi, correspondance)

      Journaliste au Monde
      SuivreAller sur la page de ce journaliste
     
  • admin9596 12:45 pm le April 12, 2016 Permaliens  

    A New York, les riches veulent payer plus d’impôts 

    Abigail Disney ou encore Steven Rockefeller souhaitent contribuer davantage aux finances publiques de l’Etat pour moderniser les infrastructures ou encore développer l’aide sociale.

    Ils sont cinquante et un, ils sont millionnaires, certains milliardaires, tous new-yorkais et signataires d’une lettre adressée fin mars au gouverneur de l’Etat intitulée : « Plan fiscal pour les 1 % ». Une nouvelle supplique pour payer moins d’impôts ? Tout le contraire. Ils réclament une augmentation du montant de la dîme qu’ils versent aux pouvoirs publics.

    Parmi les signataires figurent l’héritière de Walt Disney, Abigail Disney, ou l’administrateur du Rockefeller Brothers Fund, Steven Rockefeller. « En tant que New-Yorkais qui ont contribué et profité du dynamisme économique de notre Etat, nous avons à la fois la capacité et la responsabilité de participer à l’effort commun, peut-on lire dans la lettre. Nous pouvons largement payer nos impôts, et nous pouvons aussi en payer plus. »

    Le Rockefeller Center à Manhattan. Son administrateur Steven Rockefeller fait partie des signataires du "Plan fiscal pour les 1%".

    Une petite révolution au pays de l’Oncle Sam, où les nantis sont d’ordinaire plus enclins à distribuer leurs deniers aux associations qu’à miser sur les pouvoirs publics. « Sauf qu’il y a de nombreux domaines auxquels la philanthropie ne s’intéresse pas, comme la réparation des conduites d’eau, la création d’une ligne de bus dans certains quartiers défavorisés… », souligne Mike Lapham, le directeur de projet du Responsible Wealth, un réseau de 500 riches Américains, à l’initiative de cette lettre.

    C’est justement l’objectif de cette hausse des cotisations : rafraîchir les infrastructures vieillissantes (rénovation des ponts, des tunnels, des voies navigables et des routes). Mais aussi développer l’aide sociale aux sans-abri, financer l’éducation publique et lutter plus activement contre la pauvreté infantile.

    « Les riches Américains peuvent payer plus, ça ne changera rien à leur vie, mais ça changera la vie de l’Etat de New York. » Dal LaMagna, surnommé le pape de la pince à épiler

    Mis au point en collaboration avec le think tankFiscal Policy Institute, réputé plutôt de gauche, cet appel, également adressé à la législature de l’Etat, vise surtout à pérenniser une mesure temporaire appelée « la taxe des millionnaires ». Mise en place en 2009 à la suite d’une lettre similaire signée par une centaine de New-Yorkais, et renouvelée deux ans plus tard, elle est censée expirer fin 2017. Avec ce Plan pour les 1 %, l’Etat de New York pourrait arrondir son budget de 2,3 milliards de dollars supplémentaires.

    L’un des signataires, Dal LaMagna, 69 ans, surnommé Tweezerman – le pape de la pince à épiler – (du nom de la société qu’il a créée en 1980 et vendue en 2004), fut un candidat éphémère à l’investiture démocrate pour la présidentielle de 2008. Aujourd’hui patron de IceStone USA (fabrication de comptoirs de cuisine à partir de verre recyclé et de ciment), il dit agir en « capitaliste responsable » : « Les riches Américains disent toujours qu’il faut baisser leurs impôts pour qu’ils puissent continuer à investir, mais c’est totalement faux ! Cet argument sert uniquement les intérêts des plus riches pour qu’ils deviennent encore plus riches, s’insurge-t-il. Comme moi, ils peuvent payer plus, ils ne s’en rendront même pas compte, ça ne changera rien à leur vie, mais ça changera la vie de l’Etat de New York. »

    Dans une tribune au "New York Times", Warren Buffet avait appelé à augmenter les impôts des plus riches. Ici, en août 2015.

    En 2011, le milliardaire Warren Buffett avait défrayé la chronique en publiant une tribune dans le New York Times appelant les autorités à augmenter les impôts des plus riches. Dans la foulée, il avait rendu public sa feuille d’impôts, soulignant qu’il n’avait versé à l’Etat fédéral que 17,4 % de son revenu imposable, soit un taux nettement plus bas que de nombreux Américains (jusqu’à 41 % pour les salaires les plus modestes), y compris sa secrétaire. Mais sa revendication avait été classée sans suite. « La réalité, c’est que plus vous êtes riche, moins vous payez d’impôts », confirme Mike Lapham, du Responsible Wealth.

    Le thème a été repris par la candidate à l’investiture démocrate dans la course à la Maison Blanche, Hillary Clinton, qui s’est engagée à relever de 4 % l’impôt des Américains les plus riches. La promesse a été baptisée la « règle Buffett ». De son côté, l’autre candidat démocrate, Bernie Sanders, a proposé un taux progressif : plus on est riche, plus on paie. « Il y a vingt ans, personne ne dénonçait les inégalités aux Etats-Unis, constate Mike Lapham. Aujourd’hui s’il n’y a pas de consensus, au moins le sujet est sur la table. » « Depuis les années Reagan, les Américains voient le gouvernement comme un problème, juste bon à s’occuper de sécurité nationale, regrette Dal LaMagna. Or, c’est à lui de réduire les inégalités, et pour qu’il puisse faire le boulot, il faut le financer ! » Depuis la publication de la lettre, une dizaine de millionnaires ont spontanément rejoint le rang des volontaires.

    Lire aussi : Pourquoi Bernie Sanders résiste à Hillary Clinton

     
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