Le prochain président pourra-t-il relancer l’économie ?

Optimiste, Michel Sapin l’était lorsqu’il avait en charge le ministère du Travail et du Dialogue social. Jusqu’au bout, il avait soutenu mordicus que la courbe du chômage allait s’inverser à la fin de l’année 2013. Optimiste, il l’est toujours depuis son transfert à Bercy en 2014. A quelques semaines de la fin du quinquennat, il reste confiant quant à la capacité de l’économie française à progresser à un rythme de 1,5% cette année, conformément à la prévision fixée dans la loi de finances 2017.

« Je peux confirmer très clairement qu’une prévision de croissance de 1,5% en 2017 est aujourd’hui parfaitement raisonnable. Les principaux moteurs économiques de la France sont en marche« , a déclaré mardi le ministre à l’issue d’un entretien avec Mario Centeno, son homologue portugais, dans le cadre de la cinquième conférence économique franco-portugaise organisée à Lisbonne.

Les indicateurs dans le vert

Devant la presse, Michel Sapin a mis en avant « la reprise de l’investissement, une consommation des ménages élevée, au plus haut depuis 2007, et des exportations positives« . « Lorsque la prévision de croissance avait été établie à l’automne dernier, il y a eu beaucoup d’interrogations, mais toutes les données depuis le dernier trimestre 2016 et les premières tendances de 2017 confirment notre chiffre de 1,5%. Les entreprises sont prêtes à investir et créent des emplois ce qui permet au chômage en France de diminuer« , a précisé le ministre. Espérons qu’il ne se trompe pas.

Ce serait une jolie performance. Si le PIB tricolore devait afficher une telle progression, celle-ci serait supérieure de 0,4 point à celle enregistrée en 2016.

Rappelons, pour l’anecdote, que la loi de finances 2016 tablait initialement sur une croissance de 1,5%, estimation révisée à l’automne par Bercy, dans la foulée de statistiques macroéconomiques médiocres. La consommation des ménages, le principal moteur de la croissance française, a subi quelques hoquets que n’a pas compensé la reprise de l’investissement des entreprises qui ne ne représente que 23% de la consommation des ménages et 12% du PIB.

Les économistes sont peu confiants

Tous les économistes ne partagent pas cette confiance. Si l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) envisage une hausse de 1,5% à 1,6% du PIB cette année, la Banque de France est plus prudente et vise une croissance de 1,3% cette année. BNP Paribas est sur la même longueur d’onde.

Certains sont encore plus pessimistes. C’est le cas de Marc Touati, chez ACDEFI, qui estime à seulement 1% la progression annuelle du PIB et d’Alexandre Mirlicourtois chez Xerfi à peine moins prudent et qui table sur une croissance annuelle de 1,1% seulement.

A la différence de la plupart des candidats à l’élection présidentielle en 2012, qui semble-t-il, n’avait pas réellement pris la mesure de l’état de l’économie française après la crise de 2008-2009, les protagonistes actuels font preuve de modération. Ainsi, François Fillon envisage une croissance de 1,3% cette année puis de 1,5% en 2018. Emmanuel Macron est un tout petit peu plus optimiste, et table sur une hausse de 1,4% et de 1,8% du PIB en 2017 et 2018. Seul Jean-Luc Mélenchon témoigne d’un certain allant. Le candidat de la « France insoumise » vise une hausse de 1,8% du PIB en 2017 et en 2018. On attend le cadrage macroéconomique de Benoît Hamon. L’intégration du coût du revenu universel qu’il entend mettre en place compliquerait l’exercice.

Une estimation délicate

Un programme est-il de nature à stimuler davantage la croissance et l’emploi que les autres ? Gilles Moëc, le chef économiste Europe de Bank of America Merrill Lynch clôt le débat. « A ce jour, aucun des candidats à l’élection présidentielle n’est descendu assez dans les détails pour que l’on puisse faire une estimation sérieuse de leurs effets macroéconomiques. La granularité des mesures avancées est encore trop faible« , estime-t-il. « La seule chose que l’on peut estimer, ce sont les effets des mesures adoptées par nos voisins ces dernières années. Si la France parvient à augmenter le taux de participation au marché du travail dans les mêmes propositions qu’en Allemagne après 2003, si la France arrive à faire baisser son taux de chômage à son niveau naturel à la même vitesse que l’Allemagne ces dernières années, alors, on peut raisonnablement penser que le taux de croissance potentiel de l’économie française, actuellement de 1,2%, pourrait grimper, à 2%« , avance Gilles Moëc.