Le low cost redessine la mode
En avril, le plus grand magasin Zara de France ouvrait ses portes à Paris, face à l’Opéra Garnier. Au printemps 2018, c’est le suédois H&M qui dévoilera six étages de mode à son adresse parisienne de la rue La Fayette, au lieu de trois précédemment. Pas de pause chez les rois de la « fast fashion », la mode à prix doux et à renouvellement constant. En 2017, ils prévoient le même nombre d’« ouvertures nettes » qu’en 2016. Peuvent-ils pour autant rester indifférents aux multiples bouleversements qui secouent la planète mode et provoquent par dizaines, voire par centaines, des fermetures de boutiques des deux côtés de l’Atlantique ces derniers mois ? « Point de rupture » « La volatilité est grande, plus personne n’est tranquille », juge Valérie Renaudin, responsable du master distribution et relation client à l’université Paris-Dauphine. Pas même les deux leaders mondiaux, après vingt-cinq ans de croissance extensive quasiment sans nuages. En France, comme dans de nombreux marchés matures, « on est à un point de rupture, le territoire commercial est saturé », constate Yves Marin, spécialiste de la distribution au sein du cabinet Wavestone. Car bien des enseignes françaises se sont inspirées depuis plus de deux décennies du modèle de Zara et H&M. Le principe ? Une combinaison entre un renouvellement ultrarapide de l’offre, des prix abordables, et une extension commerciale tous azimuts. Cette stratégie de bulldozer a transfiguré des rues commerçantes autrefois dominées par les indépendants. En vingt ans, la part de marché des chaînes spécialisées, dont Zara et H&M, est passée de 17,3 % à 28,5 %, selon les données de l’Institut français de la mode (IFM). Pour Evelyne Chaballier, professeure à l’IFM, « toutes les enseignes ont poussé le bouchon jusqu’au bout, et personne n’a vu le monde changer ». Un bouleversement de fond Ce qui pouvait passer pour une longue crise suggère en effet un bouleversement…